« La reine des sentiers » (Sellerio, 2024). Qui est celle qui donne le titre au deuxième polar écrit par le duo Marco Malvaldi- Samantha Bruzzone, duo dans l’écriture et couple dans la vie ?
Ils mettent en scène, pour la deuxième fois, un autre couple Corinna Stelea, surintendant de la police judiciaire et Serena Martini, chimiste de profession et œnologue dans une autre vie. Ces deux là vont avoir à trouver l’assassin du marquis Crisante Olivieri Frangipane dont le nom est déjà une promesse d’originalité. Ce vieux monsieur est le dirigeant d’une entreprise familiale, c’est un vigneron qui gère à sa manière la Cantina alla Tegolaia. Il ne ménage personne et surtout pas son fils censé prendre sa suite. Se déplaçant partout avec un réel plaisir dans le triporteur qui lui sert à travailler dans ses vignes, il disparait un soir sans donner d’explication. Son Ape (le triporteur) sera retrouvé bien longtemps après, dans un étang appartenant à ses voisins. Commence alors le travail de Corinna avec l’aide plus ou moins volontaire de Serena. Ces deux-là se connaissent bien : Corina vit seule, son métier est sa seule raison de vivre. Serena est mariée et heureuse mère d’adolescents pas toujours faciles à gérer.
On va donc suivre ces deux personnages dans la Maremme, belle zone côtière de la Toscane qui produit de grands vins et que les deux auteurs nous font visiter en même temps qu’ils nous expliquent les subtilités de la vigne, de l’élaboration et de la dégustation du vin. Et ça vaut le détour. Serena, cuisinière confirmée, nous confie aussi quelques recettes qui vont avec . Les pâtes à la carbonara, plat qui parait simple, ne l’est pas tant que ça. Quelques détails que nous livre cette mère de famille attentive feront de nous des experts de ce plat si connu. Et il ne faudra surtout pas boire de l’eau avec les pâtes à la carbonara, ce serait comme voir un film de Sergio Leone sans la musique. Qu’on se le dise !
L’humour que maniait si bien Marco Malvadi quand il écrivait seul, se retrouve dans ce roman à quatre mains. Le portrait d’Augusta Viterbo, belle-mère de Serena, surnommée Augusta Pino en raison de sa proximité avec Augusto Pinochet est désopilant sans jamais être méchant. Les deux fils de Serena, Martino e Pietro, adolescents au flegme surnaturel épuisent la patience de leur mère qui se dépêche en permanence. Une pile d’assiette oubliée sur l’évier ressemble à une installation de Marina Abramovic, artiste serbe qui vit à New-York connue pour son caractère provocateur. Sans oublier les premières pages consacrées aux courses au supermarché faites par une ménagère de presque cinquante ans qui en fera rire plus d’un, rire jaune ou pas !
Marco Malvaldi et Samantha Bruzzone, tous deux chimistes de formation, nous livrent un policier au ton désinvolte tout en se servant de leur esprit scientifique pour nous emmener dans une enquête au déroulé logique avec un ton léger bien loin des polars sombres et noirs. Un excellent « giallo » pour découvrir qui est « La reine des sentiers ». Et pour soulager une rentrée automnale.
Philippe Poivret
La regina dei sentieri
Marco Malvaldi Samantha Bruzzone
Sellerio editore Palermo, 2024, 352 pages, 16 euro