Créée en 1991 la biennale de Lyon a lieu toutes les années impaires et rencontre depuis sa création un réel succès : 250 000 visiteurs, 532 artistes, des événements quotidiens et un budget de 6 millions d’euros l’ont placée dans les cinq meilleures biennales du monde.
Le fil rouge des biennales 2015, 2017 et 2019 est « le moderne ». Ce qui doit être compris comme la présentation de connexions infinies et comme une ouverture des « objets d’expérience », artistiques ou non, que nous rencontrons tous les jours.
En gardant ce fil rouge, la vie moderne a été choisie comme thème de la biennale 2015. En 2017 ce sont les mondes flottants qui ont été retenus par Emma Lavigne, directrice du centre Pompidou de Metz, commissaire invitée. Elle explique que Les mondes flottants sont traversés par « le vent des soulèvements, des fulgurances poétiques et déflagrations esthétiques contemporaines ». Et elle a choisi 90 artistes exposés dans trois endroits de la ville (La Sucrière, le musée d’art contemporain et un dôme). A Lyon et dans toute la région, les écoles d’art ou le couvent des dominicains de Sainte-Marie de La Tourette sont aussi des lieux de rendez-vous et d’exposition.
Lucio Fontana, Alberto Burri, Dadamaiono, Anna Maria Maiolino et Paolo Scheggi rejoignent les mondes flottants.
Lucio Fontana, le plus connu des cinq, y a une place de choix. C’est lui qui a « ouvert » la toile, qui l’a incisée, trouée, perforée. Trois tableaux sont présentés. Ambiente Spaziale (1949) : un espace noir sans mode d’emploi avec de multiples petits points jaunes. Trois dimensions de l’espaces sont indiquées, la quatrième est le temps passé par le visiteur, seul devant la toile et les décisions à prendre…. Les deux autres sont Concetto Spaziale 1950 et surtout Concetto spaziale, la fine di Dio, 1963 : un ovale rose perforé de toute part. Le spectateur hésite entre l’idée d’une blessure et une rupture sur un au-delà de la peinture, sur ce qui se cache ou se révèle derrière ces petits trous. Il se demande aussi où se cache le Dieu dont c’est la fin ! Lucio Fontana pose des questions sans réponses, interroge le spectateur face à un infini qu’il ne fait que suggérer et le laisse, solitaire, dans son questionnement.
Alberto Burri, avec ses formes abstraites remodelées par le feu, DadaMaino avec ses ellipses évidées dans la toile, Anna Maria Maiolino et Paolo Scheggi avec son intersuperficie curva verde sont les héritiers de Lucio Fontana. Eux aussi « décrivent la société contemporaine par une constante mobilité générant la dissolution des relations et des identités, le déracinement des individus hypermodernes ». Eux aussi interrogent toujours et partout. Ce sont des modernes !
La biennale de Lyon, c’est l’occasion de voir et de comprendre ce que les artistes italiens ont apporté et apportent encore à l’art contemporain. Et de les confronter au monde entier.
Philippe Poivret